Une Eglise missionnaire

Louis Harms

Le Chrétien Évangélique in 1859.

 

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HARMS (Louis) naquit à Walsrode (Hanovre), le 5 mai 1808. Son père, pasteur à Walsrode et depuis 1817 à Hermannsbourg, était un homme droit, sincère, ennemi du mensonge et de l'hypocrisie; mais il n'avait pas cette piété vivante et communicative qui réveille les cœurs. 

Louis Harms fit ses études, d'abord au gymnase de Celle, puis à l'université de Gœttingen, où il vécut d'une vie de privations, mais laborieuse et honnête; le rationalisme de ses professeurs lui fit perdre la foi qu'il avait apportée delà maison paternelle; il ne croyait plus même à l'existence de Dieu, et sans son père il eût renoncé à la carrière pastorale. Il passa ses examens avec distinction et devint ensuite précepteur à Lauenbourg, où il resta neuf ans. Là sa vie religieuse se réveilla et s'accentua de plus en plus; se sentant pressé de faire quelque chose pour son Dieu, il se mit à visiter les malades et les prisonniers et à tenir des réunions d'édification. Cité en justice, sur la plainte de l'un des pasteurs, qui était rationaliste et menacé de la prison, il déclara qu'à sa sortie de prison il recommencerait aussitôt ses réunions. On le laissa faire. Ayant intérimairement remplacé l'un des pasteurs de la ville, appelé à un autre poste, il déploya dans sa prédication une puissance et une éloquence irrésistibles; enfin le choléra ayant éclaté à Lauenbourg, il se concilia l'estime de tout le monde par son courage et son dévouement. A Lunebourg, où il devint précepteur en 1840, il déploya les mêmes qualités avec le même succès. 

En 1843 il retourna dans la maison paternelle, et fut adjoint l'année suivante à son père, comme suffragant, et, à la mort de ce dernier, il lui succéda comme pasteur. Quand son père était venu à Hermannsbourg, l'état spirituel de la paroisse était lamentable; un seul fait suffira pour le montrer. Quand il y bénit son premier mariage, la bouteille d'eau-de-vie circulait dans les rangs de rassemblée, autour de l'autel. Il rétablit l'ordre avec la plus grande énergie; et Louis Harms y apporta cette vie qui en a fait une Eglise rappelant celles des temps évangéliques, et qui a exercé une influence si bénie surtout le nord de l'Allemagne. 

Dans ce village perdu au milieu de la lande de Lunebourg, il osa entreprendre son œuvre missionnaire, au moment même où celle qui existait dans l'opulente ville de Hambourg périclitait et était abandonnée. Il en fut l'àme pendant toute sa vie, et quoiqu'il ne collectât jamais, ne frappant qu'à la porte de son Dieu, quand l'argent venait à manquer, il sut la faire prospérer et la maintenir jusqu'à sa mort exempte de déficit. Mais nous n'avons pas à parler ici des missions de Hermannsbourg, dont il sera question ailleurs (voyez l'art. Missions). 

C'est par ses prières et par sa foi aux promesses de Dieu que Harms acquit son influence au dedans et au dehors. Les dimanches de Hermannsbourg eurent une grande célébrité et attirèrent chaque fois une foule d'étrangers. Le culte du matin durait quatre heures et se terminait toujours par la célébration de la sainte cène; après une heure et demie d'intervalle commençait le service d'après-midi, qui ne finissait qu'après six heures, et dans la soirée il y avait une réunion plus intime, dans la maison de Harms. Il n'avait sans doute aucune des qualités extérieures de l'orateur, mais il savait entraîner ses auditeurs et réveiller les consciences; ses deux volumes de sermons (Evangiles et Epitres) sont devenus populaires dans toute l'Allemagne ; son journal de missions édifiait et remplissait de zèle les individus et les Eglises, et ses Goldene Aepfel in silbernen Schaalen ont fait du bien à grand nombre d'àmes. Ce qui caractérise Harms, c'est l'amour ardent des âmes, puis, la foi absolue, nous dirions volontiers massive à la parole de pardon que nous apporte l'Evangile. Il ne s'est jamais marié. "Vraiment," disait-il, quand on l'y engageait, "je n'en ai pas le temps." Il continua son ministère jusqu'à la dernière heure, se faisant transporter à son église dans un fauteuil à roulettes, lorsque l'hydropisie l'empôcha de marcher, et mourut le 14 novembre 1863, à l'âge de cinquante-sept ans. — Voyez A. Weber, Louis Harms et les missions de Hermanmbourg, Paris, 1869.

Ch. Pfender, Encyclopédie des sciences religieuses, Vol. 6, 1879